Delacave : le Chat Botte

Première réalisation du studio Delacave, La Véritable Histoire du Chat Botté, sorti début avril 2009, a peiné à trouver son public en salles : 300 000 spectateurs seulement. La faute à la concurrence de Monstres et Aliens de Dreamworks? Pas seulement : plusieurs pros du secteur pointent les défauts de l'animation, défauts qu'ils attribuent à la jeunesse du studio et de ses animateurs fraichement sortis des écoles. Un défaut que reconnait Pascal Hérold (cf ci-dessous) et qu'il se promet de corriger pour l'avenir.

Doté d'un budget de 9M €, le Chat Botté compte 900 plans pour 85' de film, et a occupé jusqu'à 120 personnes pendant les 18 mois de production. Réalisé en animation keyframe à partir des références vidéo et son du jeu des acteurs, il s'appuie sur un pipeline de production qui comprend les logiciels Maya et Motion Builder d'Autodesk aussi bien que l'outil propriétaire Fantasmagorix pour produire des images à moindre cout et plus rapidement que par les méthodes de rendu classiques ("render farm"). Un classique pour Pascal Herold qui déjà chez Duran Duboi s'appuyait sur des outils propriétaires comme les logiciels Dutruc et Delafoule pour les VFX. Fantasmagorix est détaillé en page suivante de ce dossier , mais laissons Pascal Hérold nous parler du Chat Botté et de son prochain long métrage Cendrillon. Cendrillon, qui vient d'entrer en production, est prévu pour sortir en 2011 y compris en version relief, et dispose pour cela d'un budget d'environ $18 millions.

Le Chat Botté : un projet développé « en famille »
"Le Chat Botté est notre premier long-métrage d’animation même si je fais ce métier depuis 20 ans. « Pour « Le Chat », j’ai voulu réaliser un travail assez linéaire, ne pas trop modifier l’histoire de Perrault et faire le film pour les enfants, même si, fidèles à l’esprit du conte, on s’adresse à des adultes en faisant semblant de s’adresser à des enfants. Cela reste une histoire très simple, un peu poétique avec musique et danses. J’ai eu la chance de m’entourer de deux amis talentueux qui sont Jérôme Deschamps et Macha Makeieff, créateurs des Deschiens. Jérôme a pris une part très importante dans le casting et la direction des comédiens et Macha s’est occupée des costumes qui sont absolument merveilleux.
J’ai assisté un jour à un spectacle donné par Juliette Deschamps, leur fille, et j’ai alors décidé de lui confier la musique du film. Et il se trouve que je travaillais depuis un an avec Arthur leur fils qui est graphiste et un jour on a décidé qu’il ferait la voix du prince. Donc, tout cela s’est fait sans plan marketing mais plutôt dans l’envie, qui reste la chose essentielle dans nos métiers.
Faisant ce métier depuis plus de 20 ans, je crois qu’une vraie valeur ajoutée est d’engager des artistes que je dirais manuels. Je trouve très intéressant d’aller chercher des sensibilités nouvelles dans le théâtre ou l’opéra ou encore la mode. Cela est devenu pour moi une règle d’entreprise. Pour le prochain film Cendrillon  que nous sommes en train de développer, nous prenons aussi une costumière extérieure à l’équipe. Mais je ne suis pas le seul à agir comme cela, des garçons avisés comme Luc Besson pour Le Cinquième Elément avait déjà suivi cette démarche ou encore Cocteau dans La Belle et la Bête. Je crois énormément à cette idée d’aller se nourrir à l’extérieur car parfois cela tourne un peu trop en rond entre des dessinateurs et des infographistes aussi talentueux soient-ils. »

Après le Chat Botté, Cendrillon
Pour le prochain film Cendrillon, je me suis associé avec trois auteurs formidables, les frères Apergis et Frédéric Le Bolloc’h qui ont sévi pendant quelques années à Caméra Café. Avec mon associé Michel Schmitt, nous travaillons tous les cinq à une version assez lointaine du conte, puisqu’il s’agit d’un western gothique dans lequel il ne s’agit pas d’un soulier en vair mais d’une dent perdue par Cendrillon dans une bagarre... Comme Cendrillon est un conte que l’on retrouve dans plusieurs pays, nous sommes allés puiser dans ce fonds.
Dans les premières versions chinoises, ainsi que dans la version indienne dans laquelle ce n’est pas une marraine fée qui transforme Cendrillon mais des dindons. Pour les décors, le parti pris a été de recréer, pour nos amis américains, un passé qu’ils n’ont jamais eu, c’est-à-dire de considérer que les villages de western n’étaient pas de tristes constructions en sapin — ce qu’elles étaient dans la réalité, mais des bâtiments sublimes de style Art nouveau, en acajou ouvragé. On a fait dans le riche, l’opulent, le baroque que personnellement j’adore. D’ailleurs le Chat Botté est aussi baroque, la lumière est baroque, le jeu très expressif est plus proche du cinéma allemand muet des années 20 que du réalisme. »