L'accent ch'ti de Dany Boon dans un superbe conte initiatique

Deuxième long-métrage du drômois Jacques-Rémy Girard, Mia et le Migou est un conte initiatique en animation traditionnelle mettant en scène une courageuse fillette et un étonnant personnage drôlatique dont l'accent ch'ti inimitable est signé Dany Boon !

Voyage initiatique

Mia et le Migou c'est l'histoire entremêlée d'une petite fille d'Amérique du Sud qui part à la recherche de son père, ouvrier sur un chantier à l'autre bout du pays, c'est aussi l'histoire d'un promoteur immobilier peu scrupuleux qui prévoit de saccager le dernier endroit agréable d'une Terre abimée par le réchauffement climatique, détruisant au passage l'arbre à l'envers, arbre sacré source de toute vie. C'est également l'histoire du Migou, être étrange et multiple, drôle et sensible, castagneur et géant, dont la mission est de protéger l'arbre.

Au terme d'aventures diverses et du voyage initiatique de la petite Mia, tous les protagonistes de l'histoire vont se retrouver au pied de ce fameux arbre à l'envers pour un final spectaculaire.

Portraits et stars

Mia et le Migou, aventure esthétique, écologique et même sociale, c'est aussi le plaisir de découvrir une galerie de portraits hauts en couleurs. Des personnages humbles d'ouvriers, de tantines adorables et d'une sorcière bienveillante, de quidams d'Amérique du Sud, mais aussi d'hommes d'affaires sans scrupules. Certains personnages sont interprétés par des comédiens français célèbres : Dany Boon d'avant Les Ch'tis imprime son accent si particulier au(x) personnage(s) du Migou, Yolande Moreau interprète à la fois les tantines de Mia et la Sorcière, Pierre Richard est Pedro, le père de Mia, Jean-Pierre Coffe ou Jean-François Derec font aussi partie de l'aventure...

Univers graphique

Conçu en partenariat étroit avec le dessinateur Benoît Chieux, qui a pris en charge la création graphique et le scénarimage, Mia et le Migou affirme une esthétique tout à fait particulière. L'idée : s'inscrire dans une démarche de peintre. "Chaque décor est une petite oeuvre d'art avec sa picturalité triomphante", se réjouit Jacques-Rémy Girerd, producteur et réalisateur du film. "Les miracles de l'informatique ont fait le reste pour donner à tous ces fonds de scène lumière, profondeur et cinétique." Un esprit pictural que Benoît Chieux détaille ainsi : "Le tracé de contour des personnages est ouvert, légèrement coloré et aléatoire d'un dessin à l'autre. Les décors sont peints à la gouache en format réduit puis agrandis ensuite au format des personnages pour garder cette impression de tâches de couleurs. Nous avons eu recours au travail sur ordinateur et parfois à la 3D pour les hélicoptères, les flammes, l'eau ou la fumée mais avec le souci de respecter le style très manuel du graphisme en deux dimensions, pour conserver une unité."

Naissance des personnages

"Le Migou n'est ni animal, ni végétal, ni minéral, c'est un personnage fantastique qui n'existe pas, c'est pour cela que je l'ai dessiné avec une bouche irréelle sans langue ni dents : un trou qui lui traverse le visage", explique Benoît Chieux, scénariste et créateur graphique du film. "Dans Mia et le Migou, les adultes sont beaucoup plus enfantins que les enfants qu'ils côtoient. Je cherche toujours à dessiner des personnages avec un minimum de traits", précise-t-il. "Le vêtement reflète le caractère général du personnage et évolue avec lui."

Animation traditionnelle et ordinateur

Mia le Migou est un film d'animation traditionnelle. Traditionnelle mais d'aujourd'hui. Les effets spéciaux en image de synthèse y sont omniprésents. "Au-delà de la retouche des décors, nous utilisons en permanence [l'ordinateur] qui permet de mieux gérer les effets graphiques. Les dessins entrent dans une chaîne numérique et passent de logiciel en logiciel. Le grand principe, c'est que cela ne se détecte pas", explique Jacques-Rémy Girerd. "Si dans un plan on perçoit la présence de l'ordinateur, nous revenons en arrière pour trouver une solution alternative. L'ordinateur doit se plier, pas nous. Cela dit, 20 à 25% du film sont traités en 2D ou 3D. Utiliser les outils d'aujourd'hui nous permet d'aller plus loin sans rompre avec la magie sensuelle de l'animation traditionnelle."

Six ans de préparation !

De la naissance du scénario aux derniers préparatifs de sortie du film, il aura fallu six ans pour que Mia et le Migou voie le jour. "Un film de cette nature nécessite de réaliser plusieurs centaines de milliers de dessins, tous faits à la main. C'est la raison pour laquelle il faut réunir des cohortes de bras (plus de deux-cents artistes et techniciens au total) et passer beaucoup de temps. Le film n'avance guère de plus de deux secondes par jour !", constate le réalisateur.

Des voix et une technique différente

Contrairement à la plupart des productions, sur Mia et le Migou les voix ont été enregistrées en-dehors du film. Cela a même été la première de ses étapes de fabrication. "Cela permet aux animateurs de donner vie à leurs dessins en s'inspirant directement des voix originales : ils s'imprègnent des émotions, du rythme et la sensibilité des acteurs", explique Jacques-Rémy Girerd. "Chaque comédien peut s'exprimer en toute liberté, sous ma direction, et être vraiment lui-même puisqu'il n'a pas à suivre un dessin préexistant. C'est une différence énorme. Le résultat sensible n'est pas le même, le réalisme est plus fort."

Mia et le Migou est une très belle production française. Un film esthétique, sensible, intelligent, faisant un usage juste et détendu des outils informatiques au service d'une animation traditionnelle à l'esthétique totalement picturale. Servi par des musiques entraînantes (interprétées par Mickaël Furnon de Mickey 3D ou bien Olivia Ruiz), ce film au message profond séduit parents, enfants et amateurs de - belle - création graphique. Une réussite.

Léonor de Bailliencourt - Décembre 2008
Mia et le Migou - Un film de Jacques-Rémy Girerd.
Produit par Folimages.
Avec les voix de Dany Boon, Yolande Moreau, Garance Lagraa, Charlie Girerd, Laurent Gamelon, Miou-Miou, Line Wiblé, Pierre Richard, Jean-Pierre Coffe, Romain Bouteille, Carim Messalti et Jean-François Derec.
Avec la participation de Enarmonia, Gertie, France 3 Cinéma, Rhône-Alpes Cinéma, Sayers Studio, Bayard Presse.
Sortie : 10 décembre 2008.
Durée : 1h31.