Poseidon

Un film remarquable. Peut-être pas pour son intrigue, mais à coup sûr pour ses effets visuels. Eau, feu, interagissant avec des centaines d'objets virtuels rajoutés aux décors et acteurs réels : un condensé de tout ce qu'il faut pour fabriquer un « blockbuster » hollywoodien.

La vague de 50m de haut créée par ILM

Le réalisateur Wolfgang Petersen n'en est pas à son premier film aquatique : depuis son grand succès « Das Boot » (1981, l'histoire d'un sous-marin allemand pendant la seconde guerre mondiale), il a aussi réalisé « Perfect Storm » (« En pleine tempête ») en 2000. « Poseidon » est le remake d'un célèbre film catastrophe de 1972 dont il a gardé le synopsis : un imposant navire de croisière chavire en plein réveillon du Nouvel An par suite d'une vague gigantesque; quelques survivants piégés dans la salle de bal au centre du navire tentent de se frayer un passage vers le haut, vers la surface. Un film doté de 600 plans à effets spéciaux, dont 100 particulièrement complexes pour ILM (déjà à la manoeuvre pour l'océan déchaîné dans « Perfect Storm »). Le reste a été réalisé par le britannique MPC et quelques autres studios. Plus de nombreux décors du navire montés sur vérins hydrauliques pour les faire tanguer,. Le décor de la salle de bal a ainsi été réalisé sur 20m de hauteur et en deux exemplaires : un debout pour les scènes du début du film, un renversé pour les scènes après chavirage. Et pourtant, malgré cette débauche de moyens, le succès n'a pas été au rendez-vous. A défaut d'histoire passionnante, revenons ici sur le travail réalisé par ILM, MPC et consorts.

La scène d'ouverture avec ILM
Uns scène similaire au célèbre survol du Titanic, mais encore plus longue (2 minutes et demi) et plus spectaculaire. Boyd Shermis, Superviseur des effets visuels, nous la décrit : « La caméra démarre sous l'eau, émerge, s'élève en mouvement continu, contourne la proue, longe le flanc du paquebot, découvre un jogger (l'acteur Josh Lucas)sur un pont inférieur, s'en approche, l'accompagne puis recule pour révéler tout le bateau. » Tout est 3D dans cette scène, sauf l'acteur (filmé sur fonds bleu). Le vaisseau, supposé faire 300m de long, a été modélisé chez ILM avec Maya, puis éclairé et rendu avec leur pipeline propriétaire Zeno : c'est une maquette virtuelle où interviennent 6500 pièces, répétées à plusieurs exemplaires pour la plupart pour finalement générer 180000 objets !. Le rendu est fait avec Mental Ray en illumination globale et raytracing.

Toujours plus d'eau avec ILM
Depuis « Perfect Storm » il y a cinq ans, ILM a perfectionné son système de simulation de fluides grâce aux travaux du département Infographie de l'Université de Stanford. Une équipe de 100 développeurs chez ILM a passé un an à développer le système « computational fluid dynamics » pour simuler l'interaction de l'eau et de corps solides pour la scène où la vague renverse le navire : « Ce n'est pas seulement le rendu d'une vague de 50 m de haut, explique le superviseur d'effets spéciaux Kim Libreri, mais l'interaction de phénomènes qui vont submerger le vaisseau, détruire ses superstructures et le retourner en quelques instants. Nous vous montrons des gerbes d'eau éclatant sur des objets, les recouvrant et refluant de la manière la plus réaliste et naturelle possible. »

A l'intérieur avec MPC
Les scènes d'intérieur sont traitées pour 3 des décors principaux par le londonien MPC, décidément très demandé ces temps-ci (XMen 3, Da Vinci Code). Le réveillon dans la salle de bal du Poseidon implique des centaines de personnes et d'objets divers : chaises, confettis, ballons, jetons de poker, etc. Tout ce monde bascule littéralement dans le chaos pendant une longue scène de quatre minutes quand la vague arrive. MPC a donc rajouté au décor et acteurs principaux des figurants et « props » numériques réalisés dans son « pipeline » de production basé sur Maya et Linux. Pour les animer et surtout les faire interagir et tomber, MPC a utilisé des cycles d'animation réalisés en capture de mouvements, plus son système PAPI de dynamique de corps rigide, et a effectué le rendu sous Mental Ray (une première chez eux), avec l'aide de Syflex pour la simulation de vêtements. Le studio Giant Killer Robots, en charge de scènes similaires dans la discothèque du bateau, a quant à lui animé avec le logiciel Endorphin de Natural Motion tout son petit monde d'objets et cascadeurs numériques.

Du feu sur l'eau avec MPC
Dans plusieurs scènes du film, l'eau provoque explosions et incendies, et des coulées d'huile s'enflamment par dessus. C'est le cas en particulier du lobby quand le navire a chaviré : l'eau envahit la salle en créant bulles et jets, et l'huile s'échappant des climatiseurs prend feu par dessus et provoque une colonne de feu et fumée. Pour simuler tout cela, MPC a pris une licence du logiciel Flowline développé par le studio munichois Scanline AG et l'a intégré dans son pipeline (Maya/Linux et Mental Ray) avec l'aide de Stephan Trojansky, développeur du logiciel. Autres applications de Flowline : la scène où l'eau (numérique) envahit la salle de bal et interagit avec les acteurs (réels), ainsi que plusieurs scènes sous l'eau où MPC a rajouté bulles ou flammes qui se rétractent.

Bref, un summum d'effets visuels spectaculaires, à découvrir en images ci-dessous.

Paul Schmitt- 06/2006
Sortie en salles : 14 juin 2006
Réalisateur : Wolfgang Petersen
Production : Warner Bros