Carlo Zinelli

Une beauté convulsive, comme le souligne la galerie Christian Berst, joignant la force de l’Art brut à un talent d’illustrateur exceptionnel.

L’Art brut, selon la formule du peintre Jean Dubuffet, désigne la production de personnes  « indemnes de culture artistique » et donc tirant tout de leur propre inspiration et non de modèles extérieurs. Un art spontané, autodidacte, en provenance de personnes en marge de nos sociétés, parfois internées, et qui suscite depuis les surréalistes un intérêt grandissant. La galerie Christian Berst à Paris est de celles qui s’y sont spécialisées. Leur présente exposition, jusqu’au 23 juillet 2011, présente les œuvres de Carlo Zinelli, un « pionnier » de l’art brut découvert dans les années 50 par Dino Buzzati et Alberto Moravia et apprécié de Dubuffet lui-même qui a acquis plusieurs de ses œuvres.

Né en 1916, Carlo Zinelli a commencé par travailler à la ferme, puis aux abattoirs avant que la guerre, qu’il fit comme chasseur alpin italien, n’exacerbe sa schizophrénie. Interné dès 1947, il recouvre les murs de l’hôpital de graffiti, puis intègre un atelier de peinture en 1957. Il produira jusqu’à sa mort en 1974 environ 3 000 peintures à la gouache don til  nous en reste un millier. Pris par son élan créateur, il peint dans la foulée le recto puis le verso des feuilles de papier 50x70cm. Sa narration utilise les éléments de sa vie: plantes, animaux, croix et femmes en procession pour la dévotion, mulets et étoiles symboles de son passé de chasseur alpin, seringues rappelant sa maladie. Avec des variations infinies sur ces thèmes, des métamorphoses et difformités, le jaillissement des couleurs, la répétition de lettres qui deviennent fond et décor.

Un univers sombre, mystérieux, proche du graphisme et de l’illustration contemporains (on pense à un Hector de la Vallée par exemple) et qui garde tout son attrait.

Paul Schmitt, juin 2011