Cneai Scénario d'automne

Le centre d’art Cneai de Chatou mue et s’ouvre à toutes les expérimentations artistiques.

Installé dans l’ancien restaurant Levanneur dans l’île des Impressionnistes à  Chatou (78), le centre d’art Cneai se veut depuis 15 ans non pas un musée perpétuant la mémoire des peintres impressionistes mais un lieu d’art  vivant, dédié à la publication d’artistes. « Au Cneai, explique sa directrice Sylvie Boulanger, nous nous intéressons aux oeuvres de facture industrielle et post-industrielle qui intègrent dès leur conception l’acte de distribution : publications imprimées ou numériques, sonores ou filmées, telles que le livre, le disque, le film, l’affiche, le tract, la carte postale, le magazine, les inserts, le mail, l’application… ». Une vocation réaffirmée lors de la réouverture du centre après rénovation des lieux: « Le nouveau modèle du Cneai a pour ambition de créer des évènements qui questionnent chaque étape de la chaîne recherche-production-diffusion-conservation, aussi bien dans le champ artistique que dans ses formes graphiques ou critiques. » Avec en coup d’envoi en cette fin septembre Scénario d’automne, dix points de vue d’artistes qui se prolongeront jusqu’au 21 décembre 2012.

Premier lieu de création : la Maison flottante, une barge-résidence d’artiste ancrée devant la maison Levanneur. Désignée parErwan et Ronan Bouroullec avec les architectes Jean-Marie Finot et et Denis Traversin, elle n’est pas sans rappeler les bateaux-lavoirs chers à Renoir et ses confrères. « C’est la première fois que nous travaillons à cette échelle, ce qui nous a intéressé était de trouver des principes constructifs sans esbroufe, à petite dimension, dans la lignée des maisons de Jean Prouvé » (Ronan Bouroullec ). Ressemblant plus à un wagon qu’à une péniche, cette nef métallique juste nervurée de bois (100m2 habitables) s’ouvre sur le fleuve au ras de l’eau, le manque de fenêtres côté berge préservant l’intimité du lieu.

Investissant l’espace entre la Maison flottante et le Cneai lui-même, l’architecte utopiste Yona Friedman y a installé deux œuvres monumentales, le Musée de rue et le Musée protéinique, incarnations de ses idées d’architecture sans bâtiment. Yona Friedman propose une redéfinition de l’architecture, déconnectée de la notion de construction. C’est le cas notamment des musées, qui pour l’artiste ont « besoin d’expositions et non de bâtiments, les accrochages pouvant avoir lieu dans la rue ». Et, à la fois prolongement de l’espace ouvert et sas d’entrée au reste de l’exposition, Architectures Mobiles, quinze maquettes, de Yona Friedman, présentées par îlots, forment un autre «  point de vue » à l’’entrée de la maison Levanneur, siège du Cneai.

Transformé par l’agence d’architecture Bona-Lemercier, l’ancien restaurant Levanneur devient un bâtiment fluide, lumineux, unifié par un traitement des surfaces dans un même ton de gris, par un mobilier modulable à base d’étuis métalliques qu’on retrouve, comme un signe unificateur, de salle en salle. Les 8 salles d’exposition sont l’occasion d’autant de points de vue artistiques, d’Art by telephone… Recalled, une re-création d’une exposition d’art conceptuel de 1969, aux Kome, les œuvres d’art en multiples exemplaires du belge Jef Geys.

Vous l’aurez compris, le Cneai veut aller au-delà d’œuvres achevées, statiques. Plutôt qu’une exposition, Scénario d’automne est une expérience à vivre, un projet artistique en mouvement qui requiert votre participation plus que votre visite.

Paul Schmitt, octobre 2012