Loi Hadopi : Avril Dunoyer et Jean-Jacques Tachdjian

Que pensez-vous de la loi Hadopi ?
Réponses d'Avril Dunoyer (vidéaste et chercheur) et Jean-Jacques Tachdjian (graphiste et typographe -
La Chienne).

Avril Dunoyer

"Je la trouve inepte, car elle offre une mauvaise réponse à une bonne question. C'est une organisation très lourde, pour un résultat hasardeux. Les accès aux oeuvres mutent, et la loi n'invente rien pour accompagner cette évolution, hormis le réflexe répressif...

Je remarque que depuis que je télécharge (peu), ma consommation de disques/livres/DVD/cinéma n'a pas bougé d'un iota. Si on m'empêche de télécharger, elle n'augmentera pas, mon budget n'étant pas extensible... J'écouterai plus la radio, Deezer, et je regarderai la télé.

Je suis sensibilisée à la question parce que j'écris et que je suis entourée de gens qui vivent de leur pratique artistique, enfin essaient. Je sais ce que représente l'achat.

Cela dit, aller contre le flot de l'évolution technologique et des comportements (hyperconsommation peut-être, mais aussi phénomène génial qui consiste à avoir sous les yeux telle ou telle oeuvre en quelques clics, s'en passer n'a aucun sens) me paraît vain, et un peu cynique dans un monde qui octroie 5% du fruit de son travail à un auteur."

 

Jean-Jacques Tachdjian

"Je considère qu'Hadipo est une loi d'un autre temps, conçue par des dinosaures de la culture et du show-biz pour protéger les intérêts des vampires d'une industrie déclinante.

Le XXIe siècle voit la multiplication du partage des ressources culturelles et scientifiques car ils appartiennent à l'ensemble de l'humanité qui a désormais de plus en plus les moyens de les diffuser et de les faire fructifier collectivement. La culture n'est de-facto déjà plus le jouet d'une caste dominante ni même l'outil de pouvoir de business-men avides, elle est pratiquée par tous, pour tous. Les artistes ne sont plus des spécialistes ou des fous du roi mais font un travail public qui profite à tous, aussi ne devraient-ils  pas être rémunérés par de l'argent public ? à l'instar de l'éducation, la santé, l'énergie ou le transport ?

Une caste de privilégiés à peur de perdre ses prérogatives, elle se débat, elle en appelle aux gardiens du temple d'un passé révolu."