Loi Hadopi : Marie-Noëlle Bayard

Que pensez-vous de la loi Hadopi ?
Réponse de Marie-Noëlle Bayard, designer textile, membre de l'Alliance Française des Designers et administratrice de la Société des Auteurs des Arts visuels et de l'Image Fixe (SAIF).

"La mise en place de la loi Hadopi (très compromise en France et impossible pour le parlement européen pour cause de mise en péril du droit de tous et chacun à user librement de l'accès à l'information) concerne uniquement les auteurs musique et images animées (pour résumé le cinéma et la télé).

Cette loi ne propose aucune solution pour les professions de l'image fixe : design, graphisme, arts plastiques, photo puisque que pour pallier au pillage elle incite les internautes à se moraliser en achetant les "produits culturels" sur des plateformes commerciales.

A ma connaissance, il n'existe aucune structure équivalente qui propose au grand public, et contre rémunérations des auteurs, de disposer d'images fixes. Les grandes agences photos par exemple Corbis sont ouvertes aux professionnels ou bien  mettent des photos "libre de droits" à disposition (encore faut-il définir de libre de droit).

Toutefois les images fixes sont largement pillées elles aussi, il suffit d'aller sur de nombreux sites/blogs pour voir nos images se ballader sans que nous ayons donner notre autorisation et bien entendu sans percevoir de rémunérations.

La SAIF - Société des Auteurs des arts visuels et de l'Image Fixe- réfléchit à ce problème depuis plus de 5 ans.

Notre réflexion nous amène à promouvoir, pour l'usage vers le grand public, une licence globale ou contribution créative (le terme est encore à trouver) que chaque internaute verserait chaque mois dans le cadre de son abonnement à son fournisseur d'accès internet. A ce dernier de reverser ces sommes vers les sociétés d'auteurs de chaque secteur (musique, écrit, image).

En fonction des utilisations - études réalisées par Médiamétrie - chaque auteur recevra , via sa société d'auteurs, ses droits. Une première étude a déjà été menée en 2008 : le design ressort à hauteur de 11% de la totalité des images copiées. La prochaine étude aura lieu en 2010.

Cette proposition faite par le secteur de l'image fixe par l'intermédiaire de la SAIF n'a pas été bien perçue par les majors (disques et cinéma). Mais aujourd'hui devant l'échec probant de moraliser chaque internaute l'idée fait son chemin. Aux Etats-unis, pays des libertés individuelles, l'étude de cette contribution pour rémunérer les auteurs est engagée.

Ce système équivalent à une "copie privée" comme pour les supports numériques amovibles aujourd'hui et précédemment pour les supports analogiques (cassettes audio et VHS) fonctionne depuis des dizaines d'années et permet à l'auteur et à l'éditeur industriel de percevoir les rémunérations qui leur échappent.

Il faudra encore un peu de temps et de négociations pour arriver au juste système. Il faudra également que tous les auteurs soient membres d'une société d'auteurs pour percevoir ces revenus complémentaires non négligeables. Si les auteurs restent isolés ils se couperont de leur part de rémunération qui s'annonce conséquente et qui ira en progressant avec le temps au rythme du développement d'internet.

Pour un aperçu de nos réflexion autour des nouvelles pratiques du droit d'auteur je vous engage à consulter le site de la SAIF."

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> Etienne Mineur (Incandescence)
> François Caspar (Alliance Française des Designers), Manuel Warosz (Antoine+Manuel) et Amir Habibi (Résidence Mixte)
> Avril Dunoyer (cinéaste) et Jean-Jacques Tachdjian (La Chienne)
> Serge Eyrolles (Président du Syndicat national de l'Edition)