Laurent Nivalle DA et photographe

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Laurent Nivalle, DA et photographe hors route.

Ses photos de voitures et de motos s’inscrivent dans un style associant le vintage, le cinéma et la mode qu’il a contribué à créer. Laurent Nivalle, photographe inspiré par les grands maîtres du portrait argentique, développe un univers bien à lui, en quête d’émotion.

Comment avez-vous commencé dans la photographie ?

Je suis directeur artistique au design de DS Automobiles. Je suis passé par une formation artistique classique, l’école Boulle, et j’ai fait un Master Design Produit. J’ai été embauché chez PSA comme designer couleurs et matières, à imaginer des grains, des textures, des ambiances pour les voitures, notamment sur la C4 Picasso. Pendant mes études en design, je me suis intéressé à la 3D car ça me permettait de faire de belles images. Au sein du design Citroën je présentais mes projets avec des images réalistes, ça a commencé à intéresser la Communication qui m’a demandé de réaliser quelques images de synthèse. A l’époque, la 3D était plutôt le terrain de jeu des agences, j’étais un des seuls à pouvoir faire ce type d’image en interne. Ça a donné un élan pour développer l’imagerie chez PSA.

Je me suis ensuite mis à la photo et j’ai eu l’autorisation de faire un sujet photo sur les coulisses du Design chez PSA. Mon but était de faire une exposition en interne, pourquoi pas un livre. La Communication ne voulait pas communiquer sur le Design, mais ça m’a permis de travailler sur un vrai projet, avec un sujet, et d’expérimenter la chromie, les flous, les cadres. Le livre existe, il n’a pas été diffusé, mais il m’a permis de réaliser ensuite des photos pour Citroën. C’est comme ça que j’ai commencé à travailler mon propre regard sur l’automobile.

Comment définiriez-vous votre style?

Je ne sais pas si on peut déjà dire que j’ai mon style, c’est ce vers quoi un photographe tend, mais aujourd’hui, je me pose beaucoup de questions sur mon travail. Je pense que beaucoup de tendances photographiques viennent de la mode, en termes de couleur, de rythme. La mode est un formidable terrain d’exploration car les photographes peuvent tester leurs idées, créer de nouvelles choses. La mode comme le cinéma m’inspire beaucoup et c’est assez naturellement que j’ai commencé à photographier l’automobile en m’intéressant aux gens, comme si la voiture était un accessoire pour le modèle. La série réalisée pour Le Mans Classics a été un tournant pour moi.  

Pourquoi ?

Il y a eu une forme de reconnaissance, même si à partir de là, on m’a catalogué dans une chromie plutôt vintage alors que j’ai aussi des chromies plus cinéma. En fait quand je regarde ce qui se faisait en photo sur l’automobile en 2010 quand j’ai fait Le Mans Classics, puis en 2012, j’ai l’impression d’avoir apporté quelque chose à la façon dont on photographie l’automobile, plus centrée sur l’humain. Si on doit parler de style, mes photos sur les motos ou l’automobile sont inspirées de la mode, la voiture est accessoire et je pense effectivement que j’ai peut-être contribué un peu à faire émerger ce style.

Comment votre travail photographique et votre travail chez DS se nourrissent-ils l’un l’autre ?
En fait les deux sont très interconnectés. Tous les jours, je prends ma voiture pour aller travailler chez DS, comme tout le monde. D’autres fois, je suis contacté pour des projets externes. Après c’est une question de temps, je me donne la liberté de choisir les projets qui me plaisent, pour que la photo reste un plaisir. L’univers de la moto a beaucoup influencé mon travail dans l’automobile.

Chez DS, je suis directeur artistique. J’ai un rôle assez unique, je donne mon avis sur beaucoup de choses, la réalisation des films, les shooting photo, les storyboard de pub… La photo représente 10% de mon activité. Là, je viens de réaliser le dernier film pour DS. En fait je vais chercher des photographes ou des réalisateurs, des graphistes, des agences avec lesquels on aura envie de travailler.

Il n’y a rien de pire que de choisir un photographe pour son univers et de lui imposer notre façon de faire. J’aime garder ma liberté comme photographe et donc naturellement je laisse aux photographes et aux réalisateurs avec lesquels on travaille une grande liberté pour qu’ils apportent ce qu’ils savent faire, leur créativité.

Quels sont les artistes qui vous ont influencé ?
Je suis une éponge, qui voit beaucoup d’images mais ne sait pas toujours qui a fait quoi. J’ai aussi la chance de travailler avec des chefs opérateurs qui ont une culture incroyable de l’image. J’aime beaucoup le travail de David Bailey, de Guy Bourdin, d’Irving Penn, Saul Leiter, Steven Meisel, Ernst Haas. Ce sont tous des photographes qui travaillaient en argentique. J’aime le rendu pellicule. Mais c’est difficile de dire ce qui peut nous influencer. Je suis tout aussi étonné par des sujets que je vois sur Instagram ou Behance, fait par des inconnus. Depuis 2000, il y a eu une explosion de talents.
 
La chromie occupe-t-elle une place à part dans vos photos ?
La chromie c’est un peu l’emballage, ce qui va faire ressortir une photo ou pas. Il y a cette tendance à dire qu’une photo banale devient belle avec une chromie réussie et une typo forte. Je m’interroge actuellement sur mon travail : la chromie fait partie de ma façon de photographier et je me demande en même temps si ces photos seraient bien sans cette chromie. Est-ce que la chromie devient un cache misère parfois ? Je ne pense pas car, comme pour un réalisateur, la couleur forge mon identité de photographe en participant à l’émotion qui se dégage de la photo.

Pouvez-vous décrire votre workflow ?
Mon travail de développement est simple. Je passe 5 à 10 mn par photo, rarement plus. J’importe mes RAW dans Lightroom. J’ai construit mes propres presets avec le temps, mais je développe finalement souvent chaque photo individuellement. J’aime bien partir de zéro. Je réalise d’abord un étalonnage droit de la prise de vue pour rééquilibrer ma photo. Je travaille ensuite les courbes RVB par couche, les virages, les teintes de couleur pour changer un bleu en cyan par exemple. J’aime décoller les noirs et coller les blancs, tout dépend ensuite de l’ambiance plutôt sombre, froide, chaude, que je veux donner à la photo.

Ligthroom me permet d’aller vite, j’ai le catalogue de photos à disposition, je peux appliquer mes réglages ou dupliquer un réglage vers une autre photo. Je n’utilise aucun plug-in. Je trouve que les plug-ins ont tendance à aplatir une série de photos, il n’y a pas de rythme. Je ne trouve pas ça respectueux de son propre travail. Ce n’est pas difficile de créer un rendu pellicule, un vignettage, un univers. Aujourd’hui beaucoup de gens utilisent les mêmes plug-ins. Cela crée une uniformisation, on ne voit plus la différence entre le travail de deux photographes. Je n’aime pas cet effet mimétisme. Je trouve important pour un photographe de savoir identifier une dominante, travailler une couleur. Cela fait partie de mon travail en tous les cas.

Qu’est-ce qui fait une photo réussie ?
L’émotion qui en ressort. Peu importe que la photo soit bien techniquement, qu’elle ait été prise avec tel appareil plutôt que tel autre. Elle est réussie si elle livre une émotion.  

Que vous ont apporté les réseaux sociaux et les sites de partage comme Behance ?
Je suis inscrit sur Behance depuis les touts débuts (https://www.behance.net/Nivalle). Je suis présent sur beaucoup de réseaux, mais Behance est celui qui m’apporte le plus. Quand j’ai une mise en avant, ce sont tout de suite 20 000 vues. Il y a aussi beaucoup d’acheteurs d’art qui sont inscrits. Behance m’a apporté une vraie visibilité.