Lewis Hine

Plus qu'un photographe: un combattant acharné pour la justice sociale.

Armé de sa lourde chambre photographique, Lewis Wickes Hine (1874-1940) fut un combattant acharné pour la justice sociale aux Etats-Unis. Né dans le Wisconsin en 1874, Hine suit des cours du soir tout en aidant financièrement sa mère avec des petits boulots. Il étudie ensuite la sociologie dans les universités de Chicago et New York ainsi qu'à la Columbia School of Social Work. Il s’installe en 1901 à New York pour enseigner à l’Ethical Culture School et comptera Paul Strand parmi ses élèves. Il devient photographe deux ans plus tard et se consacre très vite exclusivement à ce médium. En travaillant, à partir de 1906 pour le National Child Labor Committee (NCLC), la Croix-Rouge américaine ou la Works Progress administration, Hine utilise la photographie pour défendre les causes auxquelles il tient. Il se concentre sur « la part visuelle de l'éducation », n'hésitant pas à mettre en scène certaines de ses images pour mieux convaincre. Eveiller une prise de conscience et donner une image positive de ses sujets, tel est le principe des photographies de Hine. C'est à Ellis Island qu'il mettra pour la première fois ce principe en pratique. Armé d'un équipement encombrant et obsolète, Hine fait le portrait de centaines d'immigrants venus chercher aux États-Unis de meilleures conditions de vie.
À cette époque et jusque dans les années 1920, les États-Unis sont portés par la révolution industrielle qui entraîne des réformes sociales, économiques et politiques.  Hine va parcourir des milliers de kilomètres pour rendre compte des conditions de travail des enfants ou des ouvriers, à Pittsburgh par exemple en 1907. Les images récoltées sont nombreuses et les légendes précises. Les Américains découvrent des enfants travaillant dans les champs de coton ou dans les mines, des familles regroupées dans des taudis. Hine est, depuis le début de sa carrière lié à ce milieu progressiste qui cherche à rendre compte des bouleversements que connaissent les États-Unis. Ses reportages contribuent à diffuser cet esprit réformiste et à une meilleure prise de conscience des problèmes.

L'exposition de la Fondation Henri Cartier Bresson à Paris, jusqu'au 18 décembre 2011, rassemble environ 150 tirages originaux en noir et blanc provenant de la George Eastman House, International Museum of Photography and Film de Rochester. Cette rétrospective couvre l'ensemble de la carrière de Hine : portraits d'immigrants débarquant à Ellis Island, enfants au travail, construction de l’Empire State Building, reportages en Europe à la fin de la première guerre mondiale. On y découvre des images fortes, de misère et d'exploitation certes, mais aussi d'espoir et de vitalité présents dans les yeux de ces enfants, de ces immigrants et de ces travailleurs. Une leçon de vie et d'énergie à méditer aussi par les temps qui courent.

Clémentine Gaspard, septembre 2011