
"Le recto et le verso du livre ont construit 5 siècles de graphisme et de rapports entre le texte et l'image. Aujourd'hui, nous nous retrouvons avec des pages web pour lesquelles les hiérarchisations sont différentes. Si l'on réfléchit à l'ergonomie d'un site, on ne peut pas s'en tenir au fait que l'on balaye l'écran de gauche à droite et de haut en bas pour un Occidental. Se posent des problèmes d'espace. Pensons aux méthodes qu'utilisaient les Grecs de l'Antiquité pour mémoriser leurs discours. Ils associaient les différentes parties de leur texte à une image mentale composée d'espaces articulées entre eux. Il y a sans doute quelque chose à reprendre dans cette méthode.
Le vingtième siècle a surtout été le siècle de l'aplat, jusqu'à ce que les toiles ne soient plus qu'une seule surface de couleur. Si l'on regarde l'imaginaire des années 70, on est en droit d'évoquer un totalitarisme de l'aplat qui s'exprime particulièrement dans le groupe Supports/Surfaces, pour lequel le support devient le plus important.
Quand Philippe Apeloig crée, pour le musée d'Orsay, l'une des premières affiches post-modernistes (du moins pour les Français), il met de la typographie dans l'espace avec un ordinateur (> voir cette affiche). Il y a là un basculement par rapport à cette sorte de dogmatisme de l'aplat. Je pense que nous revenons à un imaginaire spatialisé et cela définit un champ de sensibilité important."