
"Quelle attitude face à la commande ? Il y a ceux qui l'acceptent telle quelle et qui l'exécutent... Au pire, ils mettent mal en forme des fonctions qu'ils n'ont pas été capables de réinventer. Robert Bresson dit : " il ne faut pas exécuter son scénario ". Il faut redéfinir la commande, l'améliorer, la pousser : c'est une potentialité que l'on attend d'un étudiant de l'Ensad.
Mais remettre en question la commande ne signifie pas ne pas la comprendre. Il y a un aspect éthique qui rejoint le social d'une certaine manière. Peut-être est-ce la spécificité de l'Ensad que d'assumer cette dimension. Pas le social au sens du réductionnisme social, mais au sens où ce qui est conçu va intervenir dans le cadre de vie des gens, modifier leur regard, leur comportement, et leur permettre, par exemple, des apprentissages plus faciles. Et là, on rejoint la pensée du Bauhaus et au-delà, celle de la Renaissance.
Lorsque l'on cherche une forme, il faut s'efforcer de comprendre les besoins nouveaux des gens, accepter d'en prendre le risque. Car il est plus facile de reproduire des chaises comme on a l'habitude de le faire. Quand on est un designer, on interroge les besoins et on cherche une solution. Comme, par exemple, Jean Widmer. Lorsqu'il a créé un alphabet pour les autoroutes, il a découvert qu'il fallait ouvrir l'œil de la lettre pour améliorer la lisibilité. Ouvrir l'œil pour mieux voir : tout un programme."