
"C’est une recherche que nous avons faite pour un hôpital, l’Hôpital de l’Ile de Berne. Nous avons travaillé d’une manière très large sur la question de l’orientation. Quels sont les besoins d’orientation dans un hôpital ? Comment essayer de les transposer dans la réalité. Nous avons essayé de s’écarter de la question de l’orientation telle qu’elle est toujours résolue dans les hôpitaux : c’est-à-dire faire des panneaux avec des textes et des informations. Nous nous sommes plutôt demandé ce que peut être la désorientation dans les hôpitaux. Alors, il y a bien entendu plein de questions de perspectives et choses comme ça. Ce sont bien souvent des lieux très introvertis : les fenêtres sont à l’extérieur dans les chambres, etc. Il fallait donc parvenir, dans un espace comme celui-là, à créer des moments de reconnaissance. Car ce qui fait une circulation difficile dans un hôpital c’est que premièrement que tout se ressemble (de longs couloirs, toujours pareils, etc.) et que deuxièmement, rien n’est nommable : contrairement à un village ou une ville où vous pouvez dire «vous voyez le restaurant Tartempion, tournez à gauche et vous verrez l’église», rien n’est nommable. Donc il n’y a aucun moyen d’expliquer. Donc notre parti-pris, c’était d’introduire dans l’hôpital ce que nous appelons des « accidents visuels », qui permettent d’une part de se rappeler qu’on est passé par là, de s’orienter dès la deuxième fois, donc de ne pas toujours être obligé de lire, de pouvoir s’orienter d’une manière naturelle et puis de pouvoir décrire des choses. Imaginons que se présente à l'accueil quelqu'un qui ne parle très bien la langue, on peut au moins lui dire « vous allez trouver un palmier, ou ci ou ça… ». C’est une manière de rassurer par rapport à cette introduction abstraite. Sachant que ça marche aussi bien pour la personne qui marche que pour celle qui est en brancard, qui est encore plus désorientée, à qui l’on donne ici des repères au plafond. La deuxième dimension, c’est toute la question de l’attente : attendre quand on est stressé, attendre sans savoir combien de temps on va attendre. Enfin, la troisième dimension, c’est toute la question de la réorientation après une maladie ou même après avoir été dans le coma. Donc nous avons également mené une étude par rapport à ces sujets."