Le Tableau

Légende de l’animation française, Jean-François Laguionie laisse éclater son sens de la couleur dans ce nouveau film.

Jean-François Laguionie est un maître réputé de l’animation française. Ayant « fait ses classes » chez Paul Grimault (Le Roi et l’Oiseau), il en perpétue la tradition de l’animation comme art artisanal, où les intentions artistiques sont aussi importantes que l’histoire, et où l’œuvre fait l’objet d’une lente gestation. De fait, les longs métrages de Jean-François Laguionie ne sont pas légion : Gwen et le livre de sable (1985), Le Château des Singes (1995), L’île de Black Mor (2003) et maintenant Le Tableau.

Synopsis : dans un tableau, Le Château, laissé inachevé, vivent (et s’affrontent) trois sortes de personnages : les Toupins qui sont entièrement peints, les Pafinis auxquels il manque quelques couleurs et les Reufs qui ne sont que  des esquisses. Dans cette société stratifiée en castes, l’amour du Toupin Ramo et de la Pafinie Claire va le pousser à rechercher le peintre pour qu’il finisse le tableau et mette fin aux différences/dissensions des personnages du Tableau. Le film d’aventures pour enfants se double ainsi d’un conte philosophique, les héros  (Ramo, la jeune Pafinie Lola et le déprimé Reuf Plume) sortant de leur tableau pour traverser les tableaux La Guerre (symbole de la mort et de l’absurdité) puis Venise (le rêve) avant de parvenir jusqu’au peintre. Le Tableau est aussi l’occasion pour Jean-François Laguionie et son équipe de littéralement peindre leurs mondes : couleurs fortes, à dominante de bleu-vert, et un style à la van Gogh pour Le Château, couleurs chaudes et décor légèrement surréaliste pour Venise. Un régal.

Une fabrication entièrement franco-belge
 Initié alors que Jean-François Laguionie met la dernière touche à L’île de Black Mor en 2003, Le Tableau est réalisé par le studio Blue Spirit Animation (Eric Jacquot et Armelle Glorennec) à Angoulême et Bruxelles via la filiale Sinematik. Travaillant avec un budget réduit (4M€), une équipe légère de 9 animateurs à Angoulême et 11 à Bruxelles va dessiner et animer Le Tableau, essentiellement en 2D traditionnelle avec Photoshop pour la colorisation. L’image de synthèse (avec 3DS Max) n’est utilisée que pour la séquence dans l’atelier du peintre, pour lui donner un aspect réaliste et le démarquer des séquences dans les tableaux, tandis qu’une courte séquence tournée en « live » permet de confronter le peintre avec les personnages de ses tableaux. Le compositing est effectué avec le logiciel Fusion. Un mode de fabrication artisanal revendiqué par ses auteurs, Jean-François Laguionie en tête, fiers de représenter une « French touch » artistique face aux superproductions hollywoodiennes.

Paul Schmitt, novembre 2011