HUMAN d'Yann Arthus-Bertrand

Le photographe et cinéaste Yann Arthus-Bertrand revient avec une ode filmique à l’humanité à ne pas manquer.

C’était prévisible. Dès les projections de presse, critiques et questions ont fusé : film trop naïf, pas assez politique, et pourquoi ne parlez-vous pas d’énergie nucléaire, etc. Des objections qu’Yann Arthus-Bertrand pousse gentiment de côté, refusant d’être dans la démonstration, préférant être dans le questionnement. « J’assume de faire des films plein de bons sentiments même si c’est ringard aux yeux de certains. Mon projet est utopiste et politique : faire réfléchir au sens même de l’existence pour mieux sortir de la haine et des guerres qui nous détruisent. »

HUMAN est un dyptique d’images aériennes inédites et de témoignages face caméra, la beauté plastique des images contrastant avec la mise en scène austère des interviews. Ce kaléidoscope a nécessité deux ans et demi de tournages à travers le monde. Une équipe de 4 personnes dirigée par Yann Arthus-Bertrand a accumulé plus de 500 heures d’images aériennes tournées dans une soixantaine de pays. Des tournages effectués en hélicoptère ou tout simplement en trouvant un point haut ou en tirant un câble pour la caméra au-dessus de la scène à filmer. La captation est faite essentiellement en HD, plus de temps en temps une caméra 4K avec ouverture large comme pour la scène de New York en basse lumière. Au résultat, des images splendides, reminiscentes de son fameux livre photographique La Terre vue du ciel (2000),  très graphiques par les couleurs saturées et le choix de formes géométriques qu’affectionne Yann Arthus-Bertrand, et soulignées par la musique du compositeur Armand Amar.

Les interviews ont été réalisées par 5 autres équipes dans 60 pays pendant plus de 2 ans, avec le même cahier des charges : 2020 personnes de tous pays et tous milieux se voient poser les 40 mêmes questions, sont filmées avec des Canon HD 300 sur fonds gris sombre, nous regardent droit dans les yeux et livrent leurs témoignage dans 63 langues différentes. Pas de scénario, pas de narration, tout juste un arrangement des sujets. « On a commencé par la guerre pour évacuer le sujet – un sujet que j’aimerais néanmoins retravailler dans un autre film – pour finir sur le sens de la vie. Et on a enlevé au montage des sujets comme la corruption, la religion, l’éducation. » Il fallait faire des choix : les rushes représentaient 2500 heures (200 Téraoctets) et le montage a pris un an aux deux monteuses Françoise Bernard et Anne-Marie Sangla. La version initiale de HUMAN faisait 8 heures, raccourcies en 3h11 pour la version cinématographique qui sort dans 350 salles en France ce 12 septembre 2015, avec pour les Parisiens un week-end de rencontres du 13 au 16 septembre 2015 au Grand Rex avec l’équipe du film pour partager questions, making-of, etc.

La fondation Goodplanet d’Yann Arthus-Bertrand qui produit le film ne prend aucun revenu pour inciter au prix d’entrée le plus bas possible. Le projet a en effet été intégralement financé (13 millions d’euros) par la fondation Bettencourt-Schueller qui a laissé entière liberté créative à Yann Arthus-Bertrand. Au total, le dispositif inclut pas moins de 12 films pour toucher un maximum de spectateurs : une version TV de 2h qui passera sur France 2 fin septembre 2015 avant d’être disponible en ligne, 3 documentaires de 52’ intitulés Sur les traces de Human, une sélection de témoignages et vues aériennes de 80’ intitulée Les histoires de Human, un making-of de 52’, des formats courts pour le web, etc.

HUMAN ne laisse pas le spectateur indifférent, les témoignages souvent douloureux prennent le pas sur le plaisir esthétique des paysages montrés et nous renvoient à nous-mêmes, nous interrogent. Qu’avons-nous fait de notre vie ? Quel sens lui donner ? Objectif rempli pour Yann Arthus-Bertrand.

Paul Schmitt, septembre 2015