La HD selon Avid

La Haute Définition va arriver dès 2006 sur nos écrans, en vidéo et puis au cinéma. Cette révolution technologique va changer notre rapport à l'image et notre façon de la consommer, comme dans les années 60 l'arrivée de la couleur à la télévision.Pour comprendre ce changement, pour en décrypter les enjeux, Pixelcreation y consacrera une série d'articles en 2005 et 2006 avec les principaux intervenants du marché.

Nous commençons cette série avec Marc Villechenoux, responsable communication presse et web chez Avid France . Avid est un leader historique en vidéo professionnelle, et ses solutions se retrouvent partout dans les télévisions et les studios de postproduction. Avid vient d'ailleurs de finaliser l'acquisition de Pinnacle Systems, dont la gamme est plus orientée vers les indépendants et le grand public. Avant ses responsabilités actuelles, Marc Villechenoux s'est occupé d'avant-vente pour le secteur de la postproduction et a aussi été responsable de la gamme « new media » (les logiciels de montage d'entrée de gamme Xpress). Un parcours qui lui donne une large vision du sujet qu'il nous fait partager ici.

Par Paul Schmitt

Un petit rappel pour nos lecteurs sur ce qu'est la HD?

Marc Villechenoux : Parlons ici de la HD pour l'audiovisuel, en laissant de côté le cinéma. Jusqu'à présent, nos TVs diffusent en SD (Standard Definition), cad en 720 pixels de large sur 576 lignes (standard européen PAL), et avec des images entrelacées : un premier balayage fait apparaître les lignes impaires, le deuxième les lignes paires sur l'écran, le tout formant une seule image à nos yeux grâce au phénomène de rémanence visuelle. La HD (High Definition) qui arrive peu à peu offre deux formats : 1280 x 720 lignes et 1920 x 1080 lignes. Dans ce dernier cas, on voit qu'une image HD offre plus de deux millions de pixels, soit 5 fois plus qu'une image SD! Ces images, telles qu'enregistrées par le capteur de la caméra, ont ensuite besoin d'être compressées pour en réduire la taille et pouvoir les éditer. C'est le rôle des logiciels appelés « codecs », qui se différencient par le débit qu'ils autorisent (en mégabits par seconde), par leur quantification (le nombre de bits sur lequel est codé un pixel), par leur fréquence d'échantillonage, leur nombre d'images par seconde, si l'image est entrelacée (comme en vidéo analogique) ou progressive (comme sur un ordinateur), etc. : voir le tableau ci-dessous. Les codecs HD vont du HDV (standard d'entrée de gamme soutenu par JVC et Sony) jusqu'au HDCAM SR (le haut de gamme chez Sony). Notez d'ailleurs que les codecs d'entrée de gamme ne compriment pas les images dans leur intégralité et suppriment des pixels d'entrée de jeu avant toute compression. Et le HDV ne capte une image qu'en 1440 pixels, les 1920 pixels de large n'étant atteints que par interpolation numérique (comme un zoom numérique en photo). Le but de tout ceci est bien sûr d'économiser du débit et du stockage pour les ordinateurs : un flux vidéo HD en 10 bit non compressé représente un débit de 1185 Mbit/sec., alors que les flux compressés vont de 25 Mbit/sec. (HDV) à 880 Mbit/sec. (HDCAM SR de Sony, avec une qualité proche d'un film en 35 mm).


Quels problèmes pose la HD aux pros de la vidéo?

Marc Villechenoux : Ils ont envie de garder leur confort de travail avec leurs outils de travail existants et de minimiser les investissements supplémentaires à faire au-delà du stockage supplémentaire: pas question de leur faire renouveler l'ensemble de leur parc installé! De plus, en période de transition (cad pour les années qui viennent), ils doivent pouvoir mélanger sur un même projet SD et HD, et souvent avec des formats différents.


Et quelle est l'approche d'Avid là-dessus?

Marc Villechenoux : Dès 2003, Avid a introduit une architecture, dite DNA, commune à tous ses systèmes et qui intègre les formats du marché, y compris ceux de la HD. Mais Avid a aussi constaté que la plupart des codecs HD ont été pensés pour la captation; en postproduction, ces images sont soumises à des transformations en série et se dégradent rapidement en qualité. C'est particulièrement vrai du HDV, qui encode en MPEG 2 et donc compresse les images non pas individuellement mais par groupes (GOP) de 6 difficilement maniables en postproduction. Avid a donc introduit en 2004 son propre codec, le DNxHD, conçu pour la postproduction et compatible avec les équipements existants, et supportera dès l'automne 2005 en natif dans son architecture DNA les formats HDV et DVCPRO. On. Cette offre est complétée par une carte d'acquisition HD (prix : 9700 € environ) à rajouter à un système Avid existant, carte qui décompresse la vidéo (en SDI) et la convertit au format DNxHD.


Donc, même le petit studio équipé d'une solution de montage Xpress va pouvoir se mettre à la HD?

Marc Villechenoux : Exactement, nos offres favorisent évidemment la mise à jour vers la version Xpress Pro HD. Mais précisons les choses. Xpress DV en entrée de gamme (445 € HT environ) reste dédié au DV uniquement. Xpress Pro dès ce mois d'octobre sera vendu (toujours pour 1700 € HT) avec une version « upgradée » (la 5.2) et des capacités HD pour PC . Pour Mac, la version HD viendra début 2006. Xpress Pro va donc pouvoir importer du HDV (via un port Firewire), le monter dans ce format par exemple et y rajouter des effets travaillés en DNxHD typiqement sur un système plus haut de gamme. Xpress Pro peut travailler en DNxHD, mais ne peut acquérir dans ce format : il faut passer pour cela par un système plus haut de gamme (Composer, etc.) muni d'une carte d'acquisition.

Formats Paramètres
HDV
DVCPRO 100 (DVCPRO HD)
HDCAM
Panasonic D5
HDCAM SR
Avid DNxHD
Débit (Mb/s)
25
100
135
235
440 et 880
115 à 220
Quantification (bit)
8
8
8
8 et 10
10
8 et 10
Echantillonnage
4:2:0
4:2:2
3:1:1
4:2:2 et 4:4:4
4:2:2 et 4:4:4
4:2:2
Cadence & balayage
24p, 25i&p, 30i&p
24p, 25i&p, 30i&p, 60p
24p, 25i&p, 30i&p
24p, 25i&p, 30i&p, 60p
24p, 25i&p, 30i&p
24p, 25i&p, 30i&p, 60p
Dimensions
1280x720
1920x1080
1280x720
1920x1080
1920x1080
1280x720
1920x1080
1920x1080
1280x720
1920x1080
Encodage
Compression MPEG-2
GOP 6
Suppression de pixels avant compression
Suppression de pixels avant compression
Tous les pixels conservés
Tous les pixels conservés
Tous les pixels conservés

Et qu'allez-vous faire de la gamme Pinnacle juste acquise?

Marc Villechenoux : La gamme grand public de Pinnacle (Studio, etc.) est sans équivalent chez Avid et restera commercialisée sous la marque Pinnacle. Les produits « pro » passent sous la bannière Avid : Avid Deko Avid Liquid, etc. Certes, la gamme Liquid doublonne quelque peu avec la gamme Xpress, et il est probable qu'Avid garde Liquid Chrome en haut de gamme et Liquid Edition en bas de gamme pour les petits projets « standalone » : il offre en effet l'avantage d'être un produit intégré, avec de l'authoring DVD, etc.

Pas de problème pour travailler en HD donc?

Marc Villechenoux : Il y aura plus de problèmes pour les réalisateurs que de problèmes techniques. Par exemple, mixer de la SD dans de la HD revient à agrandir l'image SD. Mais la SD n'est pas en format 16/9 (ndlr : rapport entre largeur et hauteur de l'image) comme la HD, elle est plus carrée et il faut choisir entre laisser des bandes noires sur les côtés (généralement infaisable) ou zoomer sur la partie centrale en éliminant les bords de l'image : un choix de réalisateur, pas de postproduction.