Pia Rondé et Fabien Saleil

Leur dessin envahit l’espace, invite le visiteur à se perdre dans leur labyrinthe.

Formes dessinées, peintes, sculptées : on ne sait plus trop, tout s’enchevêtre, se juxtapose pour former « Cité Fantôme », installation de Pia Rondé et Fabien Saleil au Drawing Lab à Paris jusqu’au 11 janvier 2018. Ici, les lignes se brouillent, se brisent, ou s’entrechoquent, leur installation semble s’élever comme du dessin en 3D, en élévation. Pia Rondé et Fabien Saleil dessinent, sculptent, explorent l’espace et l’habitent d'images obtenues selon divers procédés : gravure sur verre, de fines entailles rencontrant des surfaces de peinture noire ou d’encre de Chine plus ou moins opaques, diffusées en larges couches ou en lavis coulants ; mais aussi par des surfaces plus miroitantes en argenture et aux reflets habités de tâches. Un miroir est dessiné par enlèvement, explique ainsi Fabien Saleil : après le dessin sur plaque de verre, la matière réfléchissante est déposée à l’arrière et fixée avec de la peinture noire. Suit la phase de finition, de peaufinage où les artistes nettoient la surface, enlèvent les résidus.
 

« Avec la grande installation Cité-Fantôme, Pia Rondé et Fabien Saleil élaborent un espace à aborder à la fois physiquement et mentalement, à traverser comme un récit par le visiteur, analyse Lea Bismuth, critique d’art et commissaire de l’exposition. Celui-ci fait partie intégrante de l’oeuvre en l’activant par sa marche et ses détours ; il devient l’acteur d’un espace constitué de plaques de verre assemblées en un dallage morcelé au sol, mais aussi de plaques érigées telles des ouvertures ou des impasses. Tout n’est qu’ombre et lumière, transparence et pénombre sculptée de silhouettes projetées. » Et ce labyrinthe est aussi habité de formes minérales (de grandes langues de verre épais) ou organiques, trouvées dans leurs pérégrinations (une tête de cheval, une corneille, une grenouille). La vie surgit là où on ne l’attend plus, au détour d’une Cité bâtie comme un cimetière.

Clémentine Gaspard, novembre 2017