Frank Gehry à Paris

Ouverture de la Fondation Louis Vuitton, exposition au Centre Pompidou : Frank Gehry est chez lui à Paris.

Enfin, Paris a son Guggenheim ! La Fondation Louis Vuitton a ouvert ce week-end ses portes au public. Et le terme de vaisseau a rarement été plus approprié que pour ce bâtiment : douze grandes voiles formées de 3600 panneaux de verre semblent tirer vers l’avant, vers le ciel, l’immeuble sous-jacent. Un immeuble qui se veut à la fois discret et audacieux: déstructuré comme très souvent avec Frank Gehry, ses blocs et angles qui se rejoignent offrent des vues sur Paris depuis des terrasses végétalisées et   11 700m2 d’espaces exploitables en 11 galeries toutes différentes.

Pour relier « voiles » et « navire », des poutres métalliques soutiennent d’immenses  arceaux en lamelles de bois contraint sur lesquels reposent les panneaux de verre réglés au millimètre près. Et comme il se doit, ce vaisseau est entouré, mis en valeur par un bassin d’eau qui descend en escalier de la « proue » du vaisseau pour mieux entourer les bâtiments en contrebas.

Le geste architectural est inouï, tellement original qu’il valait effectivement mieux le situer à part du reste de la ville, au milieu du Bois de Boulogne, dont il émerge comme un phare. Cette Fondation Louis Vuitton est un mouvement, un jaillissement au milieu des arbres du Jardin d’Acclimatation.

Tout Frank Gehry au Centre Pompidou

Pour continuer la (re)découverte de l’œuvre de Frank Gehry, rendez-vous au Centre Pompidou pour une rétrospective majeure, jusqu’au 30 janvier 2015. Esquisses et écrans vidéo au mur, maquettes au milieu vous détaillent les principales réalisations de Frank Gehry. Prenez le temps de regarder et d’écouter les vidéos d’entretiens, notamment Esquisses de Frank Gehry (2006) réalisé par Sidney Pollack : elles sont fondamentales pour rencontrer l’homme, pénétrer ses motivations et sa réflexion créative.

Très conceptuelle, l’exposition est organisée en six pôles couvrant chacun une décennie, depuis les débuts des années 60 jusqu’aux réalisations en cours : le Guggenheim d’Abu Dhabi, le Biomuseo de Panama et chez nous  la fondation Luma à Arles. Depuis « Elémentarisation-Segmentation » (Pôle 1) jusqu’à « Singularité-Unité » (Pôle 6), on retrace le combat de Frank Gehry pour trouver des espaces, des « interstices » et échapper ainsi au modernisme fonctionnaliste tout en évitant sa caricature postmoderniste des années 70.

Alors Frank Gehry déstructure, tord, courbe volumes et surfaces. Et apprivoise même l’ordinateur et la suite logicielle Catia de Dassault Systèmes dans les années 1990-2000 pour donner forme à ses dessins. Analytique d’abord (cf sa résidence personnelle dès 1978), fusionnelle maintenant, sa réflexion est humaniste: «Derrière la complexité croissante de ses constructions, explique le conservateur Aurélien Lemonnier dans le catalogue de l’exposition, Frank Gehry cherche à reconstruire des « harmonies » par la mise en scène d’une tension du tissu urbain, d’une rupture, d’une faille, d’un choc ou via l’interaction entre différents volumes. Pourtant, ces projets font dans la ville oeuvre de médiation, de jonction, de terminaison et de couture.» Comme le musée Guggenheim de Bilbao (1997), emblématique de ce que peut accomplir un musée pour revitaliser une ville.

Nouvelles technologies, courbes et mouvements, mais au service d’un projet urbain : l’essence de l’architecture selon Frank Gehry.

Paul Schmitt, octobre 2014

Galeries à voir sur le même sujet:

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>Esquisses de Frank Gehry (2006), documentaire de Sidney Pollack