L'aube des Superhéros

La genèse d’un art novateur, d’une nouvelle façon de raconter des histoires : les Superhéros.

Les héros de Marvel sont plus souvent au premier plan ces temps-ci au cinéma, mais c’est son grand rival DC Comics qui est le créateur original du concept de superhéros avec les inventions de Superman, Batman et Wonder Woman au premier plan. Révisons donc nos fondamentaux avec l’exposition « L’Art de DC Comics » à Art Ludique – Le Musée à Paris prolongée jusqu’au 7 janvier 2018. Ce qui permet au musée de mettre à jour l'exposition en rajoutant des planches et illustrations originales de Batman par l'artiste Enrico Marini (Scorpion, Aigles de Rome) pour un album inédit sortant ce mois de novembre 2017. Plus une trentaine de dessins de concepts pour le film Justice League (sortie: novembre 2017). Aquaman, Flash, Cyborg et la nouvelle Batmobile se font ainsi une place aux côtés de Batman, Superman et Wonder Woman dont nous vous parlons plus en détails ci-dessous.

Superman, héros positif par excellence
Après une première publication dans un fanzine amateur (The Reign of the Superman dans Science Fiction: The Advance Guard of Future Civilization, 1933), deux jeunes auteurs de Cleveland, Jerry Siegel et Joe Shuster, démarchent l’éditeur de bande-dessinées d’humour National Comics Publication, l’ancêtre de DC Comics, pour proposer leur concept d’un surhomme venu d’ailleurs, qui porte en lui les symboles du progrès, de la tolérance et des valeurs fondatrices d’une Amérique tournée vers un avenir positif. Une idée bienvenue dans une Amérique émergeant avec peine de la Dépression et qui connaîtra un succès foudroyant dès sa première parution dans Action Comics #1 en 1938.

Les deux identités de Clark Kent/Superman présentent l’éternel combat de ce que signifie d’être à la fois un homme ordinaire et un super-héros. Là où le costume deux-pièces de Clark Kent tend à cacher son physique puissant, la combinaison étincelante de Superman révèle et met en valeur sa musculature. L’apparence de Superman, qu’il soit en plein coeur d’une bataille ou dans une pose héroïque, est similaire à celle des héros de la mythologie grecque, dont les sculptures antiques offrent des représentations précises et galbées. Depuis ses débuts de premier super-héros, la représentation des actions et des super-capacités de Superman a établi la norme dans la manière dont les super-héros sont représentés à travers les comic books, l’animation, la télévision, le cinéma.

Batman, the Dark Knight
Créé par le dessinateur Bob Kane et le scénariste Bill Finger, Batman apparaît pour la première en mai 1939, dans le numéro 27 de la revue Detective Comics. Il pallie l’absence de véritables super-pouvoirsà l’aide d’un entraînement physique intensif et d’un esprit aiguisé pour combattre le crime. Ainsi, une case de la bande-dessinée du Detective Comics #33(novembre 1939), le représente en chercheur à blouse blanche entouré d’éprouvettes, tandis que la case suivante le montre en haltérophile, s’inscrivant dans la lignée des hommes forts et acrobates de cirque. Ces images de Batman symbolisent l’idéal de modernité de l’époque : un corps sain et robuste galvanisé et soutenu par les nouvelles découvertes de la science. A l’opposé de Superman, le justicier étincelant de Metropolis qui évolue à visage découvert, Bruce Wayne cache son identité derrière un masque pour devenir Batman.

Les aventures du Chevalier Noir ont permis d’introduire une galerie grandissante de criminels et de super-vilains. Ces personnages mettent l’accent sur la folie autant que sur le crime. Cette thématique de la folie infuse largement les nombreux récits de Batman et revêt différents visages. Le Joker a connu de nombreuses versions depuis sa création en 1940, qui ont subverti l’image du bouffon visible sur les cartes à jouer, s’imposant comme l’un des méchants les plus emblématiques de l’imagerie populaire actuelle. Et sa compagne Harley Quinn a elle aussi pris son autonomie avec ses propres comics et son rôle dans Suicide Squad.

Batman a été l’objet de nombreuses interprétations depuis près de quatre-vingt ans, preuve de son statut incomparable d’icône dans le monde entier. De la même manière, le symbole sur le torse de son costume a évolué de nombreuses fois, renvoyant à l’esthétique de chaque époque.

Wonder Woman, fille des temps modernes
Le psychologue William Moulton Marston, fervent défenseur de la cause des femmes, convainc bientôt l’éditeur All-American Publications (société qui deviendra par la suite DC Comics) de créer un équivalent féminin aux super-héros, un personnage puissant et charismatique auquel les filles pourront s’identifier. Ainsi en 1941, le psychologue, sous le nom de plume de «Charles Moulton», invente le personnage de Wonder Woman avec l’aide de sa femme Elizabeth Holloway Marston. La super-héroïne débute dans la revue All Star Comics#8, puis ses aventures se poursuivent à peine deux semaines plus tard, en janvier 1942, dans Sensations Comics, où elle tient le rôle principal. Elle obtient son propre titre, Wonder Woman, à l’été 1942.

Wonder Woman constitue une passerelle entre la mythologie contemporaine des superhéros et celle des dieux de l’Olympe, puisqu’elle est une Amazone, un peuple de femmes guerrières issues de la Grèce Antique. Aux références à la Grèce Antique se superpose une imagerie scientifique moderne: Diana met au point la technologie du rayon pourpre qui sauve la vie de Steve Trevor, le pilote militaire dont l’avion s’est écrasé sur l’île du Paradis. Wonder Woman utilise également souvent son lasso magique doré, qui contraint ses adversaires à dire la vérité lorsqu’ils sont attachés. Ce lasso de vérité évoque beaucoup le détecteur de mensonges, dont la création a été inspirée par une invention de Charles Moulton lui-même. Comme Superman, elle revendique son patriotisme jusque dans son costume: son short bleu étoilé et son bustier rouge rendent hommage au drapeau américain, l’aigle doré apposé sur sa poitrine se réfère à un symbole majeur du pays.

Dans les années 1970, la super-héroïne s’invite dans tous les foyers américains et occidentaux, grâce à la série télévisée éponyme mettant en scène l’actrice Lynda Carter. Cette version de Wonder Woman reste l’une des plus emblématiques: elle accompagne l’explosion du mouvement féministe dans la culture occidentale et participe à la popularisation des héroïnes guerrières, qui vont progressivement conquérir la bande dessinée, le cinéma ou le jeu vidéo.

« L’Art de DC Comics » ne s’arrête pas aux origines des héros, on y trouve aussi les univers dérivés de Suicide Squad et de la  Justice League of America, qui renouvellent eux-aussi le genre en bâtissant des histoires communes à ces différents superhéros et supervilains. Au total, toute une mythologie contemporaine qu’on peut trouver envahissante, au cinéma notamment, mais qui est devenue une référence culturelle en même temps qu’un pilier de notre imaginaire.