Lauzier

Avec Lauzier, tout le monde en prend pour son grade : les jeunes cadres dynamiques des années 70-80, les machos et même les féministes !

Avec Jean Yanne (mais pas ensemble), ils ont été les critiques les plus percutants et aussi les plus fins de la société de communication telle qu’elle s’affirme dans les années 70-80. Mais alors que Jean Yanne cible médias et politiques dans ses sketchs et films (dont le cultissime Tout le monde il est beau... en 1972), Lauzier dézingue le monde de l’entreprise et de la publicité à travers plusieurs BDs elles -aussi cultissimes : La Course du Rat (1978), La Tête dans le Sac (1980), ses savoureuses Tranches de Vie (1975-1986) notamment. Post-soixante-huitards, jeunes cadres aux dents longues, filles libérées et vieux libidineux : tous ces néo-conformistes sont croqués avec un humour acide.

Il faut dire que le milieu lui est familier : après une licence de philosophie et des études à l’école des Beaux-Arts à Paris, Gérard Lauzier (1932-2008) s’installe au Brésil au milieu des années 50. Il y crée une agence de publicité et devient le dessinateur politique d’un quotidien de gauche Le Journal de Bahia. A son retour en France, une décennie plus tard, il poursuit sa carrière de dessinateur de presse en collaborant avec France Soir, Paris Match, Le Journal du Dimanche ou Lui. Il prend le chemin de la BD en rejoignant l’équipe de Pilote Mensuel dont il devient l’auteur phare en 1974 avec Lili Fatale, la célèbre aventurière reconvertie en ménagère lambda. À partir de 1978, Lauzier délaisse peu à peu la BD au profit du théâtre et du cinéma en tant qu’auteur, scénariste et réalisateur. En 1980, s’inspirant de La Course Du Rat, il écrit les dialogues deJe vais craquer, réalisé par François Leterrier. Christian Clavier y tient le rôle du jeune cadre dynamique, figure récurrente dans l’oeuvre de Lauzier. Son personnage fétiche, Michel Choupon, voit le jour en 1983 avec Souvenir D’un Jeune Homme. Révolté contre la société pourrie, l’ado nombriliste tente désespérément de vivre sans entraves et de jouir sans temps morts. Lauzier en fera un film, P’tit con, l’année suivante, dans lequel il livre une analyse au scalpel des années 70. Gérard Lauzier retournera une dernière fois à la BD en poursuivant les aventures de Choupon (1992). En 1993, il reçoit le Grand Prix de la Ville d’Angoulême, en consécration de sa carrière en BD.

Le trait chez Lauzier est marqué par le dessin de presse : juste, précis, communicatif. Les couleurs fleurent bon les années 70 : dégradés de pastels et de gris, arcs en ciel presque psychédéliques. Click the link todoslots.co and play for fun and real money A l’occasion de la sortie en librairie du deuxième volume de l’intégrale de son oeuvre (Éditions Dargaud), la galerie parisienne Huberty & Breyne nous le rappelle jusqu’au 3 juin 2017 une sélection de planches et d’illustrations issues de ses albums les plus fameux. Réédition et exposition qui présentent plus qu’un intérêt historique, car comme le souligne son ami l’acteur Daniel Auteuil, « finalement, rien de ce qu’il décrivait n’a changé, le politiquement correct continue de régner et je crois que son travail continue d’être subversif parce qu’il dit la vérité ».

Paul Schmitt, mai 2017