Un homme, deux ouvrages

Celui qui contribua, entre autres, à la popularisation des collections Folio, à travers une stylistique graphique originale, voit aujourd’hui son œuvre elle aussi compilée au creux de livres dédiés. Robert Massin, typographe, graphiste, photographe mais aussi écrivain des années soixante est au cœur de deux ouvrages riches d’illustrations et de témoignages.

 

Massin et le livre, après l'exposition...

Suite logique de l’exposition consacrée à Massin à la jeune galerie de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs l’an dernier, le catalogue se devait d’être. Rassemblant les travaux majeurs de ce pionnier en matière de graphisme, le premier recueil de la galerie, Massin : la typographie en jeu retrace le parcours sans fautes de cet autodidacte Chartrain. Présentant chaque étape de la vie de Massin, l’ouvrage publié aux éditions Archibooks, assistées de l’ENSAD propose un regard vaste sur ses projets visuels. Graphisme décalé, jeux visuels, détournements typographiques et évidemment, mises en page éditoriales, sont restitués autour de textes thématiques de passionnés de graphisme parmi lesquels Steven Heller, figure éminente du graphisme outre-Atlantique, de Roxane Jubert, enseignante et graphiste, et de Patrick Raynaud, directeur de l’ENSAD. Rédigé en anglais et en français, cet ouvrage présente également la scénographie de l’exposition, où la part belle avait été faite aux premiers travaux du créatif, alors âgé de quatre ans.

Les clubs de livres, les collaborations, les diverses collections Gallimard et les logotypes se succèdent pour donner à cet ouvrage simple, une tonalité fidèle allant droit à l’essentiel.

 

Massin : une plongée en profondeur par L. Wolff

Dédié à ceux qui ne voudraient pas déformer leurs poches en y glissant leur livre, Massin, publié aux éditions Phaidon, invite cette fois le lecteur à une immersion totale dans l’univers du graphiste, à travers un portrait complet. Organisé autour de témoignages de collaborateurs tels que Marcel Proust, Eugène Ionesco, Jean Cocteau ou encore Edith Piaf, l’ouvrage aborde l’amour de la lettre porté par Massin, tout comme son talent déconcertant de créativité et cela dans les arts visuels les plus variés. Le style "massin" transparaît ainsi dans la mise en page même du livre, parmi des sections aux thèmes majeurs et leurs pages aux reproductions généreuses.
Le contexte social et historique encadre ainsi dans le chapitre des "clubs de livres",  l’œuvre du créateur de couvertures, celui de sa carrière de "directeur artistique" chez Gallimard expose l’analyse des problèmes rencontrés par le monde de l’édition. Outre sa passion pour le théâtre de l’absurde, où les mots se tordent et les répliques se croisent sans jamais se répondre, Massin développe une expérimentation des fontes, dévoilée dans le chapitre de la "typographie expressive". Enfin, l’oreille du typographe se fait fine pour les compositions de Jean-Sébastien Bach, œuvres artistiques au rôle insoupçonné dans celle de Massin.

Petit bonus : une visite livresque et en images de la maison du maître à Etampes est retranscrite dans ce vaste projet éditorial, dans laquelle le lecteur connaîtra la frustration de ne pouvoir y fouiner.

 
Deux ouvrages clairs restituant l’œuvre d’une personnalité à l’influence aujourd’hui considérable sur la sphère graphique, qui contenteront les bourses modestes comme opulentes.
 

Agathe Hoffmann – Novembre 2007 

Massin et le livre, la typographie en jeu, est publiéaux éditions Ensad/Archibooks.
140 pages, 16 cm x 23 cm, Illustrations couleur et noir et blanc, 25 euros.

Massin
, par Laetitia Wolff est publié aux éditions Phaidon.
216 pages, 25 x 29 cm, relié, 245 illustrations couleur, 69,95 euros.