Les portraits du rugby

Après l'affrontement, l'effort et les salissures, que deviennent les colosses du rugby? Le photographe Denis Rouvre, ni joueur, ni supporter, s'est penché un instant sur le retour au calme qui réintègre les corps et les visages de ces sportifs, hommes avant tout. Un match photographique arbitré à l'espace Confluences. 

 

Sur le vif

Ces faces abîmées pourraient sortir tout droit d'un péplum, il n'en est rien. Si les joueurs de rugby que capture Denis Rouvre à la sortie du match se dressent avec la force et l'humilité des gladiateurs, ils demeurent encore empreints de toute l'intensité de la rencontre sportive, mêlée de violence et de concentration. Le surhumain laisse place à la nudité, à l'abandon qui caractèrise le retour aux vestiaires. Certains regards se délectent encore de la fraîche victoire, d'autres laissent glisser sur leur peau les flux corporels et enfler leurs arcades. Toute l'histoire du match défile comme la pellicule du photographe, qui parvient, malgré l'agressivité latente, à capter la part vulnérable présente en chaque joueur. Un curieux semblant de retour à l'enfance émerge de certains portraits, peau nue, tête renversée, regard détourné, yeux embués.

Jeu du je

Dans une tradition photographique qui rappelle celle employée par Rineke Dijkstra dans ses portraits d'adolescents israëliens au retour de leur service militaire, Denis Rouvre invite les piliers du XV de France à se laisser pénétrer par l'objectif et la lumière naturelle. Portraitisés dans une pose et un fond neutre, Julien Dupuy, Franck Alazet ou Serge Betsen dégagent bien plus que leur statut de joueur. L'humeur propre à chacun et la relation au regardant jaillissent de l'attitude qu'ils choisissent d'adopter. Après l'uniforme de l'équipe, celui de la nudité laisse cependant les caractères personnels affleurer.

Vénéré ou craint, le joueur de rugby retrouve dans cette série l'opportunité de démontrer qu'il n'est pas réductible à ses capacités sportives. Même si chacun reconnaît que le calendrier du XV de France fait beaucoup d'heureuses, ces portraits de Sortie de Match, ne finiront pas, eux, cachés dans un tiroir à la première visite suspecte.

 

Agathe Hoffmann – Septembre 2007

Jusqu'au 20 octobre
Espace Confluences, 190 boulevard de Charonne, Paris 20ème.
Du lundi au vendredi, de 10h à 18h.