Manit Sriwanichpoom Obscene

Sexe et politique revus par le photographe Thai le plus célèbre.

La photographie chinoise  occupe le devant de la scène ces temps-ci, au risque de masquer les contributions artistiques des autres pays du continent. Le Thaï Manit Sriwanichpoom n’est cependant pas un inconnu : il a déjà exposé sur tous les continents, en particulier à la Biennale de Venise (2003) et à Paris à Photoquai (2007) et au Centre Pompidou (2010). Depuis une quinzaine d’années, il s’est fait une renommée par sa critique mordante du mercantilisme et du consumérisme envahissant la Thaïlande d’aujourd’hui. Ses séries photographiques Pink Man sont explicites à ce sujet : un homme habillé d’un costume rose (couleur criarde, symbole du manque de goût) pousse un caddy tout aussi rose à travers les quartiers chics de Bangkok et au-delà.

Pour sa dernière exposition à la H Gallery d’abord à Bangkok puis à Chiang Mai (Thaïlande du nord) jusqu’au 26 février 2013, Manit Sriwanichpoom revient avec deux nouvelles séries photographiques dont le trait commun est une connotation sexuelle marquée.
Avec Obscene, Manit Sriwanichpoom continue sa critique des moeurs politiques thaïes en adaptant une iconographie occidentale au contexte de son pays. Ses photos, avec des couleurs riches, saturées, à  dominante rouge et rehaussées de bleu, jouent avec les codes de la peinture de nu  occidentale, du Caravage à Ingres, pour mieux dénoncer l’état de la démocratie dans son pays. Notons que l’usage du rouge n’est pas anecdotique, c’est la couleur du parti politique au pouvoir. Le désir et la soif d’argent de la classe politique mises à nu…

Holy Machismo est une réflexion plus introvertie, contrairement aux apparences. Manit Sriwanichpoom  a photographié en gros plan, mais de manière presque abstraite, des lingams thaïs traditionnels, statues en forme de phallus et symboles religieux de fertilité. Une série reflétant l’état d’esprit insécure de Manit Sriwanichpoom lui-même à l’orée de la cinquantaine, selon ses propres dires. Une novation pour cet artiste engagé qui n’a pas l’habitude de parler de lui-même.

Paul Schmitt, janvier 2013