Design Parade 2016
Non pas un , mais deux festivals cette année au service de la jeune création !
Pour ses 10 ans, Design Parade se dédouble : le design objets reste à la Villa Noailles à Hyères dans le Var et, nouveauté, l'architecture d’intérieur à Toulon, ville voisine. Avec toujours la même formule : un concours de jeunes designers révélés lors du festival le 1er week-end de juillet, et des expositions de designers invités tout l’été jusqu’au 11 septembre 2016 à Toulon et au 25 septembre 2016 à la Villa Noailles à Hyères.
Grand Prix Design Parade Hyères 2016 : Pernelle Poyet, ENSCI les Ateliers, Paris
Née en 1990, Pernelle Poyet a bâti son « Alphabet » avec une approche singulière du design et une rigueur dans le travail qui ont séduit le jury présidé par le designer britannique Max Lamb. L’analogie avec la typographie n’est évidemment pas fortuite : à partir d’une grille orthonormée, Pernelle Poyet a déterminé un ensemble de quatre-vingt-douze formes de base en hêtre. La surface du bois est imprimée, peinte ou vernie, augmentant ainsi le catalogue des possibilités narratives. Grâce à un jeu d’échelles, les modules calibrés permettent de confectionner de petits objets ou des meubles à l’infini.
Grand Prix du jury Van Cleef & Arpels, Design Parade Toulon, architecture d’intérieur : Studio Quetzal (Benjamin Lina, Louise Naegelen et Adrien Gadet), Ecole Bleue, Paris
Leur projet « Immersed Office » consiste en une architecture légère qui prend place au centre d’une salle et y délimite une zone de documentation et une zone de création. La bibliothèque est élaborée telle une coque enveloppante qui renferme un espace de travail isolé du monde. Un traitement complet de l’espace et une qualité de réalisation qui ont distingué Studio Quetzal aux yeux du jury présidé par l’architecte et designer française India Mahdavi.
Les expositions
Le designer britannique Max Lamb, président de jury de ce 11ème Design Parade, a été marqué par son enfance nomade dans le cadre d’une famille des forces armées britanniques. Il y voit la source de sa liberté, lui qui « ne s’engage envers aucun élément en particulier, mais plutôt envers une seule façon d’être. » Sa première exposition « Exercices in Seating » au Salone de Milan en 2015 consistait en une simple présentation chronologique des nombreux sièges créés en neuf ans de carrière. Max Lamb a profité de cette seconde exposition à la Villa Noailles pour s’embarquer dans une nouvelle collection, produisant une série d’objets étonnamment moelleux : les tapis « Space-Dyed ». Il a produit son propre fil de laine, a adapté la technique du space dyeing (technique de coloration de la laine pour obtenir un effet multicolore) dans le but de créer un matériau au motif inhérent et imprévisible, et a adopté le système semi-industriel du touffetage robotisé (robotufting). Max Lamb dévoile ici un dialogue intérieur, dans une intimité qui rend son œuvre infiniment percutante.
Samy Rio, Grand Prix Design Parade 10 en 2015 avec des objets en bambou, signe son retour à la Villa Noailles avec des travaux en… céramique, verre et bois. Les formes élémentaires des vases, ainsi que du miroir édité par la galerie Kréo, démentent la subtilité des assemblages : les choses ne sont simples qu’en apparence.
Issu de l’ECAL, finaliste de Design Parade 8 en 2013, le suisse Dimitri Bähler a travaillé les motifs, mais dans la matière à la façon d’un Pierre Charpin ou d’un Ettore Sottsass. Deux résidences successives entre 2014 et 2016 lui ont permis de perfectionner ses techniques pour modeler en un même geste le motif en relief et la forme de l’objet.
Souvenons-nous que la Villa Noailles (1923-1928) est une œuvre emblématique de l’architecte et designer français moderniste Robert Mallet-Stevens. L’association en charge des lieux souhaite lui rendre un nouvel hommage en la montrant comme emblématique de son oeuvre et des liens qu’il entretenait avec d’autres créateurs proches de ses conceptions. Constructions réelles ou simples spéculations de papier, les projets exposés viennent soit s’accorder soit faire contrepoint à la Villa Noailles. L’exposition, sur place jusqu’au 25 septembre 2016 puis à la Fondation CIVA à Bruxelles du 15 novembre 2016 au 15 février 2017, se propose surtout d’interroger le travail de Robert Mallet-Stevens : en quoi consiste « sa » modernité, quelle nécessité trouve-t-il dans cette quête, quel apport amène-t-il à ce mouvement ?
Côté Toulon, India Mahdavi fait l’éloge du bleu, couleur « qui exprime l’infini, le rêve, la douceur », au musée d’art de Toulon. Avec entre autres un superbe spécimen du canapé Dune de Pierre Paulin, dont les vagues évoquent irrésistiblement la mer juste à côté. Et, last but not least, des pièces du designer Italien Ettore Sottsass éditées chez Kartell, ainsi que des pièces rares sont à découvrir à l’espace Savonnières.
Clémentine Gaspard, juillet 2016