Entretien avec Guillaume Aretos, Production Designer, Dreamworks Animation

Entretien avec Guillaume Aretos, Production Designer (Chef Décorateur) :

Avant d’occuper le poste de chef décorateur déjà sur Shrek 2, Guillaume Aretos a été l’un des directeurs artistiques de Shrek, pour lequel il remporte l’Annie Award du meilleur décor. Il a contribué au premier long métrage en images de synthèse de PDI/DreamWorks, Fourmiz, et conçu pour le développeur animatronique Edge Innovation de nombreux animaux fantastiques que l’on a pu voir dans des films comme Peur Bleue et Dinotopia.Né en France, Aretos travaille depuis trois décennies dans le spectacle, notamment comme scénariste et acteur (on se souvient de sa série L’Homme à tout faire, diffusée à la fin des années 80). Ses peintures et dessins ont été exposés dans de nombreuses galeries françaises, ainsi qu’au Palais des Beaux-Arts et au Musée d’Art Moderne. Il a publié en outre plusieurs ouvrages illustrés, dont Le Livre Secret des Fourmis, et contribué à des magazines comme «Ciel et Espace», «Science et Nature» et «Métal Hurlant».

Pixelcreation : Vous êtes un des intervenants ayant passé le plus de temps sur ce film...
Guillaume Aretos : Oui, presque 4 ans! J'ai même commencé sur Shrek 3 alors que Shrek 2 n'était pas encore fini. En tant que Production Designer, j'étais responsable général de l'image du film et supervisais les directeurs artistiques. J'ai commencé par un an et demi de préproduction, à travailler en petite équipe (environ 15 personnes) avec le réalisateur, le producteur, les D.A. et quelques artistes (l'Art Department). Il s'agissait de designer les personnages et les décors, ainsi que l'ambiance des scènes. Ensuite, la phase de production a duré 2 ans avec 350 à 400 personnes au travail. Là, j'ai continué à faire du design pour environ 20% de mon temps et supervisé les autres départements pour le reste. Cela veut dire regarder chaque jour les « dailies » (cad les images produites) par  le modeling, les Character TDs, le surfacing, le layout (position des caméras). Je joue aussi le rôle de directeur de la photo pour le lighting, pour déterminer la lumière et les réflexions sur les surfaces. Je travaille beaucoup avec le Superviseur Fx, en l'occurrence Philippe Gluckman, pour tout ce qui est simulations. Enfin, la phase finale de mon job consiste à étalonner le film avant sa « release ».

Pïxelcreation : Et il y a eu beaucoup de changements en comparaison avec les premiers Shrek?
Guillaume Aretos : Pas de révolution, mais beaucoup de changements. Ceux-ci proviennent d' un mélange d'améliorations techniques et de désirs esthétiques. La technologie d'animation étant devenue plus fine, il a fallu refaire tous les personnages, leur squelette et set-up, et aussi les simulations qui vont avec, beaucoup plus puissantes pour vêtements et poils entre autres. Il y a par exemple beaucoup de simulations de drapés (robes des princesses, etc.) alors qu'il y en avait très peu avant. On a aussi systématiquement utilisé le displacement mapping par dessus la géométrie, alors que nous l'avions peu fait dans Shrek 2 et pas du tout dans Shrek  car c'était trop lourd à l'époque. Pour l'éclairage, nous avons privilégié l'illumination globale, en rajoutant des déflecteurs de lumière comme dans une prise de vue réelle.

Pixelcreation : Et votre vision de ce film comparé aux autres?
Guillaume Aretos : On est toujours dans le même style de « réalisme stylisé », mais l'ambiance est un peu différente. Le point central de ce film est l'angoisse de la paternité, ce qui le rend plus sombre que les précédents films. On s'est efforcé de jouer cela dans les décors aussi, avec pour résumer une ambiance automnale plutôt que printanière, dans des décors de style « british », voire nordique.

Paul Schmitt, juin 2007