Revoir Paris de Francois Schuiten et Benoit Peeters

Utopies architecturales des deux derniers siècles, visions dessinées de François Schuiten et Benoît Peeters, reconstitution en 3D interactive par Dassault Systèmes : Paris designé, Paris imaginé, Paris fantasmé.

Nul besoin d’être extra-lucide pour deviner les penchants architecturaux du dessinateur François Schuiten. Son premier cycle de BDs, Les Terres Creuses (1981-1990) avec son frère Luc Schuiten, abonde en grandes constructions et perspectives généralement verticales. Une tendance qui se renforce avec la série Les Cités Obscures (1982-2009) avec Benoît Peeters au scénario : « Jouant avec les signes de la modernité d’hier, nous avons mis en scène un monde au futur antérieur où les tissus urbains et les strates temporelles s’enchevêtrent. Paris y apparaît sous le nom de Pâhry, à côté de villes imaginaires comme Samaris, Urbicande et Calvani. »

Paris, un Paris rétrofuturiste, est de nouveau la vedette de leur dernier album, Revoir Paris, paru en novembre 2014 chez Casterman. L’héroïne Kârinh vit dans une colonie spatiale au XXIIème siècle, rêve de Paris qu’elle n’a jamais vu que dans les livres et s’en va découvrir la Ville Lumière en un voyage initiatique.

L’exposition Revoir Paris à la Cité de l’Architecture à Paris, jusqu’au 9 mars 2015, prolonge ce nouvel album : François Schuiten et Benoît Peeters font dialoguer leurs visions futuristes avec une sélection de dessins d’architectes et de projets d’urbanisme conçus pour Paris depuis deux siècles. 

D’un côté les planches de la BD et d’autres travaux de François Schuiten (illustrations réalisées pour illustrer un roman inédit de Jules Verne, scénographies dessinées pour la station de métro Arts et Métiers ou projets conçus pour le Grand Paris) De l’autre, des vues tirées de  projets grandioses d’architectes du XXème siècle comme Auguste Perret ou Le Corbusier ou des gravures de science-fiction du XIXème siècle comme celles d’Albert Robida imaginant le Paris du XXème siècle.

Ces visions sont parfois proches de l’urbanisme actuel : on découvre par exemple que l’architecte Yona Friedman imagine dans les années 50 que de vastes surfaces agricoles seront intégrées à l’intérieur d’un Paris sur pilotis pour nourrir la population. Une préoccupation « verte » que l’on retrouve ces dernières années avec le design d’immeubles végétalisés et de jardins de proximité.

Point commun à toutes ces utopies : la dimension verticale. Dès Albert Robida, on imagine se déplacer en aéronef de toit en toit, et aussi bien Auguste Perret que Le Corbusier prônent un « regard aérien » pour un urbanisme moderne. Notons que leurs rêves de tours gigantesques n’ont jamais fait consensus, comme l’a montré ces dernières semaines l’échec du projet de Tour Triangle pourtant soutenu par la maire de Paris Anne Hidalgo. Raison de plus pour réfléchir et prendre plaisir à ces fantasmes récurrents de gratte-ciels auprès desquels Notre Dame ou même la Tour Eiffel font figure de nains.

En complément, l’Institut Passion for Innovation de Dassault Systèmes propose une expérience immersive inédite : découvrir trois monuments parisiens emblématiques en 3D, la cathédrale Notre-Dame de Paris, la tour Eiffel et la Défense. On peut faire évoluer le monument parisien de son choix, en s’aventurant dans le passé le plus lointain comme dans un avenir hypothétique dessiné par François Schuiten. Un dispositif visualisé sur place par projection interactive sur écran circulaire, pilotée en direct par le visiteur depuis une table tactile. Et qu’on peut retrouver sur le site dédié : paris.3ds.com/revoirparis.

Paul Schmitt, janvier 2015

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