Kung Fu Panda 2
Une saga qui se bonifie avec ce deuxième volet. Dreamworks Animation fait progresser intelligemment l’histoire de son panda maître-ès-kung fu et réussit ainsi à soutenir l’intérêt du spectateur.
A la quête de soi-même du premier Kung Fu Panda succède un approfondissement des liens du héros à la fois avec sa camarade Tigresse et avec son père qui tient un humble restaurant de quartier. Le design artistique et le graphisme ont eux aussi progressés avec des couleurs saturées où le rouge prédomine et une richesse de décors qui rend hommage à la Chine. Saluons aussi un relief stéréoscopique très finement utilisé, tout en profondeur et pas du tout en jaillissement.
L’évolution des techniques depuis le premier film a bien sûr été mise à profit dans Kung Fu Panda 2. La ville de Gongwen a ainsi été modélisée entièrement, ce qui eut été difficilement possible en 2008. Et beaucoup de scènes, y compris la bataille finale, se déroulent sur et dans l’eau, avec le défi correspondant de rendre correctement les fourrures et plumages mouillés des personnages…
A suite du premier Kung Fu Panda, nous avons repris langue avec le « Frenchie » Rodolphe Guenoden, Superviseur de l’animation et chorégraphe des combats en kung fu, sur cette nouvelle réalisation de Dreamworks Animation :
Pixelcreation : Le premier film avait été plus storyboardé que scripté, est-ce le cas aussi pour ce nouveau film ?
Rodolphe Guenoden : Le script a été plus travaillé dans Kung Fu Panda 2, mais tout évolue toujours dans le storyboard. Et nous avons eu plus de liberté créative que dans le premier film, nous avons pu pousser le côté graphique grâce au Chef décorateur Raymond Zibach et au Directeur Artistique Tang K. Heng. Ils ont fait un superbe travail aussi bien pour les séquences 2D (les flashbacks de Po sur son enfance) que 3D. La réalisatrice Jennifer Yuh Nelson a aussi apporté sa patte, pas tant à cause de ses origines chinoises (elle a grandi aux US) que parce qu’elle est fan de films d’action et de kung fu.
Pixelcreation : Vous qui êtes à la base un animateur formé aux Gobelins, les séquences 2D ont dû vous réjouir…
Rodolphe Guenoden : L’idée était de faire de ces séquences en 2D un « trademark » de ce film. Dans le premier Kung Fu Panda, seuls les génériques de début et fin sont en 2D. Ici, les souvenirs d’enfance de Pô sont aussi en 2D ce qui permet d’en utiliser les possibilités comiques et dramatiques. Autre séquence en 2D : les origines du seigneur Shen, le méchant paon, détaillées en ombres chinoises. Là, nous avons dû rajouter des défauts à l’animation des marionnettes pour lui redonner ce caractère artisanal, comme si quelqu’un manipulait les marionnettes derrière le rideau.
Nous avons dessiné, scanné et colorisé les dessins et animé dans After Effects.
Tout ce travail en 2D a été fait en interne, seul le générique de fin a été sous-traité en Chine par manque de temps.
Pixelcreation : Votre pipeline de production a dû aussi évoluer depuis trois ans.
Rodolphe Guenoden : Il évolue constamment, bien sûr, mais une version entièrement nouvelle d’EMO, notre logiciel d’animation, devrait être mise en place pour le prochain film (on ne pouvait pas en changer en cours de film, c’est trop risqué). Elle permettra de travailler avec un stylet et une palette graphique, cela se rapprochera plus du dessin. Les points de contrôle des marionnettes pourront être manipulés directement plutôt qu’au clavier et à la souris, la relation sera plus directe et intuitive. J’attends cela avec impatience…
Pixelcreation : Sur Kung Fu Panda 2, le relief a-t-il changé votre façon d’animer ?
Rodolphe Guenoden : Non, pas vraiment, même s’il faut faire plus attention. Il faut que tout fonctionne pour les deux yeux, vérifier la direction des regards, etc. La chorégraphie des combats dépend aussi de l’angle des caméras, mais autrement ce n’est pas très différent. Nous avons voulu utiliser le relief de façon subtile dans Kung Fu Panda 2, immerger le spectateur dans l’univers, pas le lui jeter à la tête.
Pixelcreation : Comment avez-vous conçus le personnage du seigneur Shen, le nouveau méchant de ce film ?
Rodolphe Guenoden : Le seigneur Shen est un paon, mais nous avons voulu une nouvelle vision d’un oiseau, pas simplement refaire Grue. A l’époque de la conception de Kung Fu panda 2, en 2008, c’était les JO de Pekin avec de la gymnastique rythmique : j’y ai vu beaucoup de contorsionnisme et d’élégance à la fois. Nous avons ainsi donné à Shen un style académique dans le maniement de l’épée, avec en plus des mouvements inattendus, tordus. Nous avons fait un test en 2D, puis donné les indications à l’équipe de rigging… ce qui n’a pas empêché les difficultés de surgir tout le long du film. En particulier avec sa queue : Shen s’en sert comme d’un membre de plus, pour bloquer la vision ou frapper un adversaire.
Pixelcreation : Les loups, sbires de Shen, sont eux très stylisés
Rodolphe Guenoden : Nous leur avons mis un masque pour leur garder un côté mystérieux et anonyme. Ils fonctionnent en meute, où ils sont tous identiques.
Pixelcreation : En dernier plan du film, on voit apparaître le vrai père de Po dans son village de pandas apparemment rescapés du massacre ordonné par Shen. Une indication pour un prochain film ? Où vous serez bien sûr de la partie ?
Rodolphe Guenoden : C’est l’impression que donne la séquence? En fait, nous avons fait apparaître le père de Po surtout pour montrer que tous les pandas n’avaient pas été exterminés, idée que nous trouvions gênante, plutôt que comme appel du pied.
Quant à moi, je donne actuellement un coup de main à divers projets dans le studio, en attendant de savoir si Dreamworks va lancer un Kung Fu Panda 3. Là, tout dépend des résultats au box-office de Kung Fu Panda 2…
Paul Schmitt, juin 2011
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