Memory Palace
20 graphistes et designers renommés mettent en scène leur vision d’un texte de science-fiction dystopique.
On pourrait presque parler d’exercice imposé, de figure de style comme dans une école de design graphique. Thème de l’exercice : Memory Palace, texte de l’écrivain anglais Hari Kunzru.Le sujet est de prime abord réminiscent de Fahrenheit 451 de Ray Bradbury ou de 1984 de George Orwell : un dissident londonien est fait prisonnier et torturé par un état totalitaire dans un futur proche.
Mais le thème prend ici un tour différent : notre civilisation technologique et interconnectée s’est écroulée, victime d’une énorme tempête magnétique. L’humanité est revenue dans un Moyen-Age où on se veut proche d’une nature sauvage, où les notions mêmes de culture et de civilisation technologique sont haïes. Les souvenirs de l’époque précédente sont parcellaires et déformés.
Hari Kunzru, en formulant ces souvenirs, explore ainsi la notion de mémoire et nous livre une autre vision, déformée et presque magique, de notre civilisation telle que se l’imagine son héros dans sa cellule ou telle que la décrivent les autorités.Le défi pour les 20 artistes ayant répondu présents à l’appel, est de donner vie matériellement à Memory Palace, d’en saisir chacun un fragment pour lui donner corps.
L’illustrateur français Némo Tral a imaginé et dessiné les ruines du Stade Olympique. Le typographe israélien Oded Ezer, habitué des vidéos conceptuelles, joue avec les caractères et interprète les définitions et concepts de notre époque dont se souvient tant bien que mal le héros. Le collectif anglais Le Gun conçoit une ambulance surréaliste, proche du chariot d’un charlatan dans un western.
Et le tout devient un parcours à l’intérieur du Victoria and Albert Museum, musée des arts décoratifs de Londres, jusqu’au 20 octobre 2013. Une expérience aussi, qui casse les frontières entre art, littérature et design.
Paul Schmitt, septembre 2013